La vente d’un local commercial au Palais des Princes repose le problème de cet espace situé à proximité du cours Pourtoules.
Ce bâtiment existe, il faut le terminer ou établir un contre-projet, puis le réaliser.
Même si le dazibao1 affiché par la municipalité actuelle sur l’une des vitrines de sa façade tend à faire croire en l’incurie de la municipalité précédente, nous ne pouvons pas imaginer que l’état d’abandon de ce bâtiment est voulu.
Que dirait-on d’un Maire qui laisserait en plan un patrimoine inachevé et délaissé, uniquement pour l’exemple, juste pour caricaturer et pour humilier ses prédécesseurs ?
Un espace en état d’abandon et vendu à la découpe
Mitoyen de l’Hôtel-Dieu qui possède une façade, pas de programme et pas de contenu, l’espace Clodius, rebaptisé le Palais des Princes par la municipalité d’aujourd’hui, a été détourné de son objet et de son programme initial. Jamais terminé et sans entretien, il est devenu une verrue repoussante de saleté. Aujourd’hui, pour couronner le tout, la ville a décidé de vendre un volume commercial à destination d’une activité inadaptée au site.
Il est important que les orangeois se rappelle de l’initialisation de ce projet.
Le contexte historique
L’origine de l’opération Clodius remonte à la Déclaration d’Utilité Publique du 4 septembre 1987 relative à une opération de Résorption d’Habitat Insalubre destinée à créer des logements sociaux dans le quartier Villeneuve-Portette.
Dans un premier temps, les fouilles archéologiques, obligatoires dans le cadre de cette opération, ont révélé une architecture urbaine et des pièces de la vie courante datant de l’époque romaine.
Parallèlement et pour mettre aux normes sa bibliothèque, la ville recherchait un lieu d’implantation pour sa future médiathèque.
Par ailleurs, le succès et la fréquentation généré par la programmation diffusée au Hangar à Spectacles rendaient indispensable la construction d’une salle avec une jauge qui corresponde aux besoins d’une ville de 30000 habitants.
Non seulement le site dit de Clodius répondait aux objectifs initiaux, mais en plus il permettait d’apporter, grâce à des équipements culturels et touristiques essentiels, un véritable dynamisme au cœur de la cité.
Le projet arrêté, un concours est lancé le 15 février 1991.
Après une étude de faisabilité, soixante-un candidats se manifestent. Neuf équipes sont invitées à se présenter devant le jury siégeant le 6 novembre 1991. Quatre cabinets sont retenues pour présenter un projet plus élaboré. Le jury de quatorze membres, composé de professionnels, de financeurs et de personnalités qualifiées, désigne le 4 février 1992 et à l’unanimité, le cabinet d’architecture Babel-Seban.
Après une nouvelle enquête d’utilité publique, l’arrêté du Préfet et la délibération du Conseil Municipal du 16 novembre 1992, le projet Clodius entre dans sa phase de réalisation.
Véritable opération d’urbanisme, outre ses espaces liés à l’habitat, à la culture, au tourisme et au commerce, ce projet devait permettre d’établir un cheminement piétons entre la place Pourtoules et le centre-ville, et surtout devait fixer une partie de ces piétons sur une nouvelle place publique. Cette place faisant office de forum, baptisée « Place de la Liberté », est celle clôturée et connue aujourd’hui sous le nom d’Esplanade Verdi.
Un projet inachevé, l’architecture et les façades
Le projet retenu par le jury, a obtenu en 1995, le prix d’architecture du journal professionnel Le Moniteur.
Lien entre l’Orange antique et la ville d’aujourd’hui, l’organisation de cette architecture devrait s’articuler autour d’un ensemble attractif et vivant. Elle devrait privilégier le mouvement en créant une nouvelle rue publique reliant le cours Pourtoules au centre ville.
Le parti architectural s’inscrit dans l’opposition d’une logique d’enfouissement de la cité romaine avec celle résurgente du bâti de la ville moderne. La salle de spectacle devrait être comme suspendue au-dessus de vestiges vus de la rue, mais restant à découvrir par une passerelle s’intercalant entre l’histoire et la modernité. La façade devrait dessiner l’empreinte du plan du site.
Si ce projet ne paraît pas abouti, c’est que ses crédits ont été coupé par la municipalité et qu’il n’est pas terminé. S’il avait été fini, les gens auraient une autre vision de son architecture et de son ouverture vers l’extérieur.
Les vestiges n’ont pas été mis en valeur ! La façade vitrée et son ossature en aluminium donnant sur la rue n’ont pas été réalisées ! De plus, cette rue de liaison et son esplanade sont clôturées et fermées, soirs et week-ends !
Ce projet, mélange d’architectures contemporaine et méditerranéenne, est un beau projet. En leurs temps, la Tour Eiffel et la Pyramide du Louvre ont autant été décriées que Pablo Picasso et Salvador Dali à leurs débuts.
Un espace à réhabiliter et un programme à terminer
Le projet de réalisation de l’espace Clodius est né de la volonté de redynamiser le cœur d’Orange et d’améliorer la qualité de vie de ses habitants.
Cet équipement structurant est essentiel et utile à l’ensemble de la cité pour :
Ø ses logements sociaux,
Ø le développement d’une politique culturelle au service de tous,
Ø la conduite d’une politique patrimoniale valorisant nos richesses et augmentant notre attractivité touristique,
Ø la création d’équipements de services, de commerces, d’un restaurant et d’un café.
Au travers des personnes appelées à fréquenter les divers espaces, le programme de ce projet reposait sur l’animation du centre ville. L’avoir abandonné lui enlève toute sa dynamique. A l’origine, ce projet était un bon projet !
Un espace aux multiples facettes
L’habitat
Une cinquantaine de logements sociaux, locatifs ou en accession à la propriété, apportent des populations nouvelles au centre de la cité. Ils se répartissent en deux blocs et se différencient du reste du bâtiment par ses façades et ses volumes. Le thème de la lumière et de son filtrage est l’élément fédérateur de ces façades jaunes de Naples, rouges Pompeï et terres de Sienne. Le volet, tant décrié par certains, est l’image d’une architecture du soleil détourné de l’architecture méditerranéenne traditionnelle.
La société des HLM Nouveau Logis Provençal a réalisé et financé entièrement cette part de ce projet. Ces persiennes à l’italienne que certains trouvent laides sont du domaine privé et ne sont pas du tout sur la partie municipale du bâtiment !
La médiathèque
En vitrine sur la rue, une médiathèque de plus de 2500 m2 offre un choix important de livres et de CD.
Le choix des documents est contestable et la partie vidéo n’a jamais été équipée !lien vers un article publié sur L'express Juillet 96
La salle de spectacle
Une salle de spectacles de 600 places permet de conduire une politique d’animation culturelle en dehors des périodes de Chorégies. La modulation de la salle et un dispositif mécanique devraient permettre à ces dernières d’assurer des répétitions à l’abri des intempéries et de libérer des espaces-temps au théâtre antique.
La partie modulable et le dispositif mécanique n’ont pas été fait ! Son monte-charge qui s’est écroulé il y a quelques semaines n’a jamais été réparé !
La Maison Clodius ou le musée de site
Un site archéologique et touristique complétant un patrimoine monumental unique devrait permettre aux touristes de prolonger leur séjour, d’aider au développement économique et à la création d’emplois.
Ce fragment de ville antique, cette rue et cet habitat, ces mosaïques, ces pavés et ces objets de la vie courante, nous donneraient l’opportunité de faire comprendre la vie domestique de l’époque contemporaine au théâtre antique, lui qui est figé dans sa monumentalité.
Alors que le tourisme local périclite et que l’on veut faire monter les bus sur la colline, ce musée n’a pas été exécuté !
Le Hall
Elément fonctionnel fédérateur, traité de façon unitaire, le hall central très convivial devrait desservir tout à la fois, le musée, la salle de spectacle, la médiathèque, l’administration et le café. Forum d’aujourd’hui, il permettrait de voir et d’être vu.
Ce niveau principal n’a pas été équipé !
La salle polyvalente
Une salle polyvalente pour les manifestations organisées par les associations pourrait accueillir 150 personnes en places assises.
Cette salle a été détourné de son objet et aujourd’hui, elle est envahi par les pigeons !
Les commerces, le café et le restaurant
Les équipements culturels et touristiques devraient se démarquer clairement de la rue et du reste du bâti, la terrasse du café et la colonnade couverte servant de lien avec le cours Pourtoules. Le café serait un tampon entre l’intérieur et l’extérieur, café sur le cours et bar de foyer pour le pôle culturel.
Les commerces, le restaurant, le café et la colonnade couverte n’ont jamais été installé !
Le coût
Le coût de ce projet faisant polémique, il est nécessaire de définir ce dont on parle. La TVA étant récupérée par la ville, nous prendrons les prix hors taxes. Nous parlerons du projet sans les logements payés par la société d’HLM, mais avec la réalisation de la rue et de l’esplanade. Nous prendrons en compte l’immobilier, les équipements et les actions d’accompagnement, y compris celles financées sur les budgets de fonctionnement et plus particulièrement le marché d’entreprise de travaux publics (METP) concernant la salle de spectacle.
Dans cette configuration et par délibération du 16 novembre 1992, le conseil municipal a approuvé le budget prévisionnel total qui s’élevait à 10.5 M€ dont 7.61 M€ rien que pour l’immobilier, les subventions et les recettes diverses à 7.4 M€, et le solde à la charge de la ville à 3.1 M€.
Vu que l’espace Clodius n’a pas été terminé, pour ce qui est de la part de la ville, on peut considérer qu’il n’a pas coûté ou qu’il n’aurait pas dû coûter plus que la salle des fêtes dont l’architecture est loin d’être un modèle de réussite.
En 1995, lors du passage de relais entre la municipalité Labé et celle de Bompard, le gros-œuvre terminé, le budget réel total s’élevait à 10.6 M€, les subventions et les recettes diverses à 5.3 M€ et le solde à 5.3 M€. Sur ce solde, doit être retirer 1.1 M€ correspondant à l’estimation des non-réalisations du musée et de la façade principale. Ce qui établit le solde net pour la ville à 4.2 M€.
Malheureusement, sur cette somme doit être rajouté 1.64 M€ correspondant au niveau de subventions d’Etat perdues suite à l’arrêt du projet par la municipalité Bompard et au non respect des engagements de la ville.
A ce sujet, il est intéressant de lire l’extrait du rapport de la Cour Régionale des Comptes du 21 février 2002 :
« Des difficultés sont apparues au cours de l’année 1997 entre la nouvelle municipalité et le ministère de la Culture à propos de la réalisation du pôle culturel et de son financement. A ce jour, l’opération est terminée mais les difficultés initiales n’ont pas été levées. En effet, en ce qui concerne la bibliothèque-médiathèque, l’Etat a subventionné une première tranche de travaux à hauteur de 0.46 M€ mais le financement restant est semble-t-il gelé dans l’attente du recrutement par la commune des personnels compétents et de la définition des modalités d’acquisition des ouvrages. Pour le financement de la salle de spectacle, la ville n’a perçu que 0.42 M€, l’Etat lui ayant demandé de préciser ses intentions de gestion et de prendre l’engagement de confier cette gestion à une équipe indépendante choisie sur la base d’un projet artistique et d’une programmation. Au titre du projet muséographique la subvention prévue a été versée à hauteur de 0.31 M€. L’Etat n’a pas versé le solde, reprochant à la ville d’Orange d’avoir modifié sans concertation avec les services du ministère de la Culture le projet initial qui serait ainsi dénaturé dans ses éléments essentiels. Un contentieux est actuellement pendant devant le tribunal administratif de Marseille à ce sujet.
La Chambre constate une insuffisance manifeste de concertation entre les différents partenaires associés au projet du pôle culturel. Cette opération ambitieuse, qui n’a malheureusement pas atteint l’ensemble de ses objectifs, engendre à ce jour, faute du versement des subventions promises, un surcoût du financement supporté par la ville de l’ordre de 1.64 M€. Le renchérissement de l’opération CLODIUS est encore aggravé par le choix du marché d’entreprise de travaux publics (METP) comme mode de financement de certains éléments de la construction. »
Pour ce qui est des subventions d’équipement, des ventes et des droits divers qui se chiffraient à 4.56 M€ dont 3.64 pour le seul musée, ils sont passés aussi par pertes et profits et cela pour les mêmes raisons.
En ce qui concerne le METP, la démarche engagée par la municipalité Labé était dictée par plusieurs impératifs :
Ø réaliser rapidement un investissement important,
Ø se dispenser de prévoir une enveloppe budgétaire à la hauteur des besoins,
Ø réduire ses frais de fonctionnement en mettant à la charge du titulaire du marché l’exploitation technique et la maintenance des fluides et des équipements scéniques.
L’enveloppe financière globale a été évaluée à 6.35 M€, à laquelle il faut retrancher 0.23 M€ de subventions prévues et 2.95 M€ de frais à imputer sur le budget de fonctionnement. Il s’ensuit que la part liée à l’investissement s’établit à 3.17 M€. Quoiqu’il en soit l’ensemble de ces chiffres, y compris celui relatif au fonctionnement, est comptabilisé et inclus dans le budget prévisionnel du 16 novembre 1992.
Pour conclure, si la municipalité Labé avait mené à son terme ce projet, il aurait coûté à la ville 3.1 M€.
La municipalité Bompard qui l’a arrêté, annonce le chiffre de 18.6 M€ ! Comprenne qui pourra !
En 1995, le budget réel était conforme aux prévisions de 1992. La mécanique s’est déréglé du fait de l’arrêt du projet et de la perte très importante de subventions, de ventes et de droits.
Dans un projet de ce type, où s’encastre plusieurs opérations, la ville a intérêt à croiser un certain nombre de subventions. Certaines qui sont d’un niveau très élevées peuvent financer d’autres opérations et cela de manière tout à fait légale.
Prenons l’exemple du musée. Ses fondations et son plafond sont aussi ceux de la salle de spectacles. Deux de ses murs sont mitoyens de la médiathèque et des commerces. Quant au hall d’entrée, il est commun à l’ensemble de ces divers éléments immobiliers. Il en va de même pour une partie des équipements. Cet enchevêtrement permet à la ville de choisir légalement, les meilleurs niveaux de subventions de l’Etat et des collectivités territoriales.
Dans le projet Clodius, l’opération du musée était celle qui était la plus subventionnée et la moins coûteuse. Le fait de ne pas l’avoir réalisée a plombé fortement le montage financier de l’ensemble du projet.
Ne pas prendre en compte l’ensemble de ces données nuit à l’information des orangeois.
Une large utilisation municipale
Malgré la critique et l’état de dépérissement du lieu, la municipalité utilise très largement cet espace.
Le Palais des Princes et son esplanade Verdi, la médiathèque Amédée de Pontbriand et la salle de spectacles occupent une place de choix sur le site de la ville d’Orange. D’ailleurs, l’essentiel de la programmation culturelle de la municipalité se tient en ces lieux. Tout comme la tenue des Universités d’été du Mouvement de Jacques Bompard, l’Esprit Public.
PS: cette mise au point écrite par André, un membre de notre association, en 2006 est toujours d'actualité