Neuf ans après les inondations exceptionnelles qui ont noyé la ville d’Orange, Christine BADINIER, Présidente de l’association ORANGE AUTREMENT, a interviewé André ROSANIA, ancien élu municipal, pour faire le point sur les dossiers relatifs au risque inondation.
Plan de Prévention du Risque Inondation (PPRI)
CB. Où en est l’évolution du plan et quand sera-t-il appliqué ?
AR. Il faut savoir que c’est l’état qui mène le plan et qu’à l’heure d’aujourd’hui, nous attendons toujours l’arrêté préfectoral approuvant le PPRI sans pouvoir en estimer le délai.
Il faut rappeler que l’enquête publique s’est déroulée en janvier 2011 et que l’ensemble des documents provisoires du PPRI peut encore être consulté sur le site Internet de la Direction Départementale des Territoires de Vaucluse (http://www.vaucluse.equipement-agriculture.gouv.fr/rubrique.php3?id_rubrique=668)
La ville d’Orange devra obligatoirement intégrer le PPRI à son Plan Local d’Urbanisme (PLU). En attendant, la municipalité doit appliquer le principe de précaution correspondant au plan soumis à enquête publique.
CB. Pourquoi la zone de l’étang ne figure-t-elle pas au PPRI ?
AR. N’étant pas dans le bassin versant d’un cours d’eau, le quartier de l’Etang ne peut pas être pris en compte dans le PPRI.
Néanmoins, situé dans une cuvette de plus de 2 m de profondeur, il est fortement exposé au risque inondation. Il aurait dû être classé en zone NA-I (zone naturelle inondable) par la municipalité et devenir de ce fait inconstructible.
Quoi qu’il en soit, classé en simple zone NA, tout comme la sablière qui la jouxte, il ne peut subir aucune modification majeure. La construction éventuelle d’un complexe sportif est forcément une modification majeure.
Schéma d’aménagement hydraulique de la Meyne
Bassins écrêteurs de crues
CB. Où en est-on de la réalisation des bassins ?
AR. Les bassins sur l’Ancione (48000 m3) et sur Pont Balançant (85000 m3) ont été réalisés en 2010.
Les projets de réalisation des bassins du "Merderic est" (12000 m3 amputé de la réserve de la déviation de la RN7), de "Cagnan aval" (65000 m3) et du "Raphaëlis casier nord" (23000 m3 amputé du "Raphaëlis casier sud") sont bouclés. La Région et le Département ont voté le financement de cette tranche de travaux depuis plus de 6 mois. On n’attend plus que celui de l’état (25%). Ce dernier devrait donner sa réponse durant cet automne. La durée des travaux sera de l’ordre de 6 mois à dater de l’accord de l’état.
En ce qui concerne le bassin du "Raphaëlis casier sud", il reste à acheter un des terrains nécessaires. Le propriétaire pourrait aller à l’expropriation. Il sera réalisé dès que la maîtrise du foncier sera complète.
Les bassins de "Cagnan amont" (28000 m3) et du "Méderic complémentaire" (5 à 6 hectares à proximité de l’hôpital) seront construits après l’acceptation par l’état du Plan d’Action et de Prévention des Inondations (PAPI) et du contrat de rivière n°2.
Il est à noter que ces bassins sont indispensables à la protection d’Orange lors de crues décennales et que toute urbanisation de ce secteur devra entraîner la réalisation de bassins complémentaires.
Dérivation de la Meyne ou bassin amont de 250000 m3
CB. Où en est-on des projets de dérivation ou de très grand bassin, et quelle est la position de la municipalité d’Orange ?
AR. La dérivation n’a toujours pas été réalisée car la municipalité est contre sa réalisation. Elle sera réinscrite au contrat de rivière n°2 car elle est indispensable à la protection du cœur de ville. Il est à espérer que les édiles municipaux revoient leur position.
Pour ce qui est de la réalisation d’un bassin amont de grande capacité, il est évident que l’on ne pourra jamais trouver les 25 hectares de terrains nécessaires.
Schéma d’aménagement urbain de la Meyne
CB. Où en sont les projets de mise en valeur de la rivière et du patrimoine, et quelles en sont les priorités ?
AR. Ils sont inscrits au contrat de rivière n°2 qui devrait être signé dans les 6 mois à venir et de ce fait, ils seront financés à 80%. Il est à espérer que la ville finance les 20% restants.
Pour ce qui est des aménagements hydrauliques, il est préférable d’aller de l’aval vers l’amont pour faciliter l’écoulement des eaux et pour réduire un peu plus le risque inondation. En cœur de ville, lorsque cela est possible et lorsque cela n’entraîne aucun risque potentiel de fait, les berges devront être rehaussées par des murets ou des talus végétalisés.
En ce qui concerne les aménagements paysagers de la rivière, la priorité devra être donnée à la création d’un parcours piétonnier entre le Pont-Neuf et le Pont de Langes. Ce cheminement alternant trottoirs, pontons et balcons en bois, en surplomb de la rivière et éclairés la nuit, devra intégrer des arbres à hautes tiges.
Aménagements publics autour de la Meyne
Pôle aquatique de la colline et complexe sportif de l’étang
CB. Quels seraient les impacts hydrauliques de ces réalisations et quelles en seraient les solutions ?
AR. Le projet du Yéti-Parc de l’étang ne comporte aucun document technique et la municipalité n’a fourni aucune assurance quant à sa faisabilité. Toutefois, nous savons qu’un bassin de rétention de 2,5 hectares est envisagé. Mais, face à la construction d’importants équipements comprenant des bâtiments recevant du public, des immeubles d’habitation, des routes d’accès et de très grands parkings, cela paraît nettement insuffisant.
Par sécurité pour les populations riveraines et pour raisons économiques, il faut délocaliser ces implantations à vocation régionale à proximité d’un échangeur autoroutier.
CB. En cas de transfert de ces projets vers l’un de ces échangeurs, quels en seraient les impacts hydrauliques et quelles en seraient les solutions ?
AR. Les terrains placés à proximité de l’échangeur "Orange centre" sont pour la plupart classés en zone rouge d’inondation centennale et de ce fait, ils sont inconstructibles pour tout bâtiment public.
Pour ce qui est de la zone de l’échangeur "Orange sud", il n’y a aucun risque hydraulique. Ce secteur semble le plus approprié à ce type de réalisations. Les projets actuels sont adaptables et transposables à moindre coût. Le réseau routier est existant et des parkings commerciaux pourraient être utilisés en partie sans aucune difficulté. Ils seraient un plus économique important pour eux-mêmes, pour Décathlon et pour le Parc Commercial des Vignes.
Désengorgement du réseau d’eau usée
CB. Quels sont les impacts des déversoirs sur le milieu naturel ?
AR. Lors de travaux de réhabilitation, il est de règle de séparer les réseaux d’eaux usées de ceux des eaux pluviales.
Les anciens réseaux unitaires sont quant à eux, équipés de surverses. Lors d’orage, ces derniers peuvent rejeter jusqu’à 40% de leurs eaux dans la Meyne. De ce fait et par phénomène d’entraînement, il s’ensuit un rejet d’eau usée dans le milieu naturel.
Entretien et renforcement des digues de l’Aygues
CB. Quel est l’état des digues et qui en a la responsabilité ?
AR. Il y a peu, les digues appartenaient aux riverains qui devaient en faire l’entretien. Le morcellement faisait que celui-ci était quasiment impossible.
Face à ce problème récurrent sur l’ensemble du territoire français, l’état a décidé de classer toutes les digues en quatre catégories s’échelonnant de A à D.
La catégorie A est celle qui regroupe les ouvrages des barrages et les digues ayant un impact important sur les personnes et les biens des zones habités par plus de 50000 personnes. Cette catégorie doit être traitée en priorité et en urgence.
Le préfet du Vaucluse a surclassé la digue de l’Aygues en catégorie A. La municipalité d’Orange n’ayant pas fait appel en temps voulu, a aujourd’hui l’entretien et le renforcement de 7 km de digue à sa seule charge. A l’heure actuelle, 70% des propriétaires ont cédé leurs morceaux de digues à la ville.
Sachant que trois secteurs risquent de céder en cas de crues centennales (amont voie ferrée, aval RN7 et amont passerelle), la ville doit faire réaliser immédiatement des études de résistance que l’on peut chiffrer à 350000€ et faire exécuter au plus tôt les travaux nécessaires.
CB. Qui a en charge l’entretien du lit et des pieds de digues ?
AR. Le Syndicat Intercommunal pour l’Aménagement de l’Aygues (SIAA) a en charge la bonne gestion, l’entretien et le renforcement des pieds de digues.
Pour faciliter l’écoulement des eaux et éviter les embâcles pouvant provoquer la rupture des ponts, il doit enlever la végétation luxuriante qui envahit le lit de la rivière et étaler les alluvions qui s’amassent.
Mais, elle doit le faire en tenant compte du classement Natura 2000 de la rivière, et de la présence de loutres et de castors dans son environnement.
Aménagements privés autour de l’Aygues
Carrière Maroncelli sur l’Ile des Rats à Piolenc
CB. Quels peuvent être les impacts hydrauliques de l’extension de la carrière sur Piolenc, puis sur Orange, et de création d’un port fluvial dédié ?
AR. Une demande d’extension de 25 hectares fait l’objet d’une demande sur l’Ile des Rats à Piolenc.
D’autre part, le carrier demande la création d’un quai minéralier privé sur la commune de Caderousse à proximité de sa carrière de Piolenc. Ce quai pourrait servir à d’autres trafics, tels que ceux des déchets de bâtiments et de recyclage. Il pourrait avoir un trafic de plus de 50000 tonnes par an.
Une autre extension de carrière de près de 100 hectares était prévue sur Orange dans la boucle de Gabet. La municipalité avait d’ailleurs classé ce secteur en zone de carrière.
Le préfet de région a donné un avis défavorable à cette dernière car cette extension n’est pas utile au plan de carrière départemental. De plus, son impact environnemental serait très négatif.
Outre les impacts paysagers et les risques de pollutions accidentelles, cette extension aurait des incidences liées aux bruits, aux poussières et au trafic de camions. Par ailleurs, les incidences sur le milieu naturel, la faune et la flore, ne feraient qu’ajouter à celles sur la qualité et l’écoulement des eaux souterraines et superficielles.
Démolition autos Pélissier au pont de l’Aygues
CB. Quelles sont les règles de remblaiement partiel du lit d’une rivière ou de ses abords et ont-elles été respectées lors de la construction du rond-point de la route de Lyon ?
AR. Il est absolument interdit de remblayer les zones d’expansion des crues.
Pour ce qui est du remblaiement concernant la démolition autos du pont d’Aygues, les services préfectoraux de la police de l’eau ont été saisis. A ce jour, nul ne sait où en est l’instruction de ce dossier.
Un autre dossier orangeois est dans les mains de cette même police. Il s’agit de celui des terres provenant de l’excavation du bassin de rétention situé près du rond-point de Bricomarché à Fourchevieilles qui ont été déversés au sud d’Orange dans une zone d’expansion du Rhône.
Le risque inondation est un sujet important. Début janvier 2009 nous avions écrit au maire à ce sujet.
Voici sa réponse du 26 janvier 2009 retrouvé dans nos archives
Mesdames, Messieurs, les Elus,
J’ai bien reçu votre courrier en date du 5 Janvier2009 qui a retenu toute mon attention.
Concernant la réalisation des bassins d’écrêtage de crues, vous n’êtes pas sans savoir que la Ville d’Orange est associée à hauteur de 50% de la part hors subvention sur les acquisitions foncières et les travaux des 6 bassins prévus.
Le projet de délestage de la Meyne, pour permettre le passage de la crue décennale en centre ville, est un projet ancien qui mérite plus qu’une réactualisation des coûts pour être validé.
En effet des études détaillées devraient venir en complément, et notamment sur l’efficience de cet ouvrage une fois l’ensemble des bassins réalisés ainsi que l’impact du délestage sur la zone avale (même si cette dernière est réputée calibrée pour une crue décennale).
C’est pourquoi, il me semble plus sage de procéder à la réalisation des 6 bassins prévus afin d’en mesurer les effets. Aux vues de ces résultats nous serons à même de reconsidérer la nécessité d’un délestage qui ne pouffait devenir d’actualité qu’après une étude exhaus6ve des nouveaux bassins de la Meyne.
Par ailleurs les eaux en provenance de Camaret et Travaillan ne sont absolument pas tamponnées et se répandent massivement sur notre territoire communal.
La réalisation d’ouvrages d’écrêtage et/ou de rétention, dont elles ont l’obligation, par ces collectivités voisines ne suffirait-elle pas à nous épargner du délestage de la Meyne?
Il serait inconcevable que l’on procède à l’étude suscitée avant la réalisation de ces bassins de Camaret et Travaillan.
En d’autres termes, les Orangeois doivent-ils financer des infrastructures à la place des villages ne respectant pas la loi?
Je vous prie de croire, Mesdames, Messieurs en l’expression de mes salutations distinguées.
commenter cet article …